Curieusement, ce qui est dit « d’encre » [nuit, sang, etc.] n’augure rien de bon – alors que c’est là le moyen d’expression idéal, le vecteur de l’écriture, de la littérature, de l’imaginaire ! L’encre de ce roman fantastique véhicule pourtant elle aussi de sombres desseins, puisque l’extraordinaire pouvoir de Mo, jeune père de famille en cavale avec sa petite fille, a donné vie aux personnages d’un roman, mais les ingrats semblent lui en vouloishow morer à mort… Cornelia Funke, qui fut d’abord illustratrice pour la jeunesse, a un sens très expressif de ce que signifie s’incarner pour un personnage, et le fonctionnement de Coeur d’encre – premier d’une trilogie – bénéficie spectaculairement de ce talent. Dans le jeu de poupées russes qu’est la folle poursuite entre personnages principaux et créatures au second degré, l’amalgame est subtilement orchestré, et le dosage du fantastique, qui fait parfois douter de son propre bon sens, est très réussi !